« Entrevoir à quoi ressemblerait un monde sans réduction de nos émissions de gaz à effet de serre. » S’appuyant sur les scénarios du GIEC, le Réseau Action Climat a récemment publié le rapport « La France face au changement climatique : toutes les régions impactées ». Un document-choc permettant de mesurer concrètement et localement les conséquences à court et long termes du réchauffement climatique. Et face à ces enjeux, le Passif se présente comme l’une des solutions possibles. Explications.
Submersion des côtes normandes et bretonnes, fonte des glaciers dans les Alpes, cyclones et ouragans dans les DOM-TOM, pertes agricoles en Bourgogne-Franche-Comté, canicules mortelles en Île-de-France, vagues de sécheresse et d’inondations en Pays de la Loire… En découvrant la carte de France des impacts du changement climatique insérée dans ce rapport publié par le Réseau Action Climat en partenariat avec l’ADEME, on peine à identifier une région de l’Hexagone à l’abri de la hausse du mercure. C’est sans doute parce qu’aucune ne sera épargnée.
Face à ce constat, deux attitudes sont raisonnablement envisageables : l’adaptation et la réaction. En effet, « au niveau mondial, sur la dernière décennie 2011-2020, le réchauffement climatique a atteint 1,1°C par rapport à l’ère préindustrielle ».1 Les changements sont donc déjà en cours et il faudra apprendre à composer avec. Ce qui n’empêche pas de tout faire pour limiter l’ampleur du réchauffement et se rapprocher de l’objectif de l’Accord de Paris sur le climat : maintenir l’augmentation de la température sous 2°C par rapport à l’ère préindustrielle.
Dans ce contexte, quelle aide peuvent apporter les bâtiments passifs face aux conséquences du réchauffement climatique ? Et comment peuvent-ils contribuer à en prévenir les effets ?
- Réduire nos émissions de gaz à effet de serre
Par définition, les bâtiments passifs affichent une très grande performance énergétique. Très isolés, sans ponts thermiques, dotés d’une excellente étanchéité à l’air, conçus selon des principes bioclimatiques et équipés d’une ventilation mécanique continue avec récupération de chaleur, ils consomment 2 à 3 fois moins d’énergie qu’un bâtiment classique, même conçu selon les principes de la RE2020. C’est d’autant plus intéressant lorsque l’on sait que le chauffage représente un poste majeur d’émissions de CO2 en France. Dans le secteur résidentiel, il était par exemple responsable de 80% des émissions en 2019.2
Très performants du point de vue du confort d’été, les bâtiments passifs permettent également de se passer de systèmes traditionnels de refroidissement, comme les climatiseurs. Or, comme le rappelle le Réseau Action Climat dans son rapport, « la climatisation, bien que tentante, n’apparaît pas comme une option satisfaisante, car elle est émettrice de gaz à effet de serre, accroît la demande en énergie, renforce la chaleur environnante (dans les rues par exemple) et n’est pas accessible pour toutes les classes sociales. C’est un exemple de maladaptation qui accroît les inégalités sociales et nous enferme dans des pratiques énergivores alors que la sobriété s’impose. »
- Être résilients dans les zones les plus touchées par la chaleur
Selon le Réseau Action Climat, les canicules seront plus longues, plus chaudes et plus fréquentes. Très dense et fortement urbanisée, l’Île-de-France sera particulièrement touchée, avec des températures dépassant les 50°C à l’ombre si rien n’est fait.3
Parce qu’ils sont performants du point de vue du confort d’été, les bâtiments passifs offrent à leurs usagers et habitants un refuge efficace contre les vagues de chaleur. En effet un bâtiment ne peut obtenir le label « Bâtiment Passif » que s’il ne dépasse pas les 25°C plus de 10% du temps sur une année. Enfin, le logiciel de conception PHPP intègre un outil nommé « Summer Tool » permettant d’anticiper une augmentation des températures de 3°C par rapport à la normale. En la matière, le Passif devient donc comme un véritable enjeu de santé publique.
- Contribuer à maintenir une indépendance énergétique
Sécheresses et fortes chaleurs auront également pour conséquences de marquer davantage les tensions autour des ressources en eau, ce qui pourrait avoir un impact sur la production d’énergie en France, en particulier sur l’hydroélectricité et le refroidissement des centrales nucléaires. Ce, dans plusieurs régions de l’Hexagone et notamment en Occitanie, où l’hydroélectricité est la première source d’énergie (32,7 % de la production).4
Dans ce contexte, l’indépendance énergétique de la France pourrait donc reculer. Or, en réduisant la consommation primaire d’énergie sur le territoire, le Passif contribue à préserver cette indépendance…
1 Datalab, “Chiffres clé du climat. France, Europe. Monde.”
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-du-climat-2022/1-observations-du-changement-climatique#:~:text=Le%20r%C3%A9chauffement%20de%20la%20derni%C3%A8re,l’Accord%20de%20Paris).
2 Ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires – Émissions de GES du résidentiel et du tertiaire – Édition 2022
https://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/edition-numerique/chiffres-cles-du-climat-2022/13-emissions-de-ges-du-residentiel
3 Réseau Action Climat,« La France face au changement climatique : toutes les régions impactées », p. 51
4 Ibid., p.70